#12 - Construire et fédérer une communauté Web3

L’épisode d’aujourd’hui nous permet d’entrouvrir les portes d’une nouvelle réalité communautaire très réjouissante pour ses builders, comme ses membres : celle de la communauté dans le Web3. Pour nous initier à ses subtilités, nous avons eu la chance de pouvoir échanger avec Jeddi Mees, expert Growth et Program Manager chez Crypto Fellowship : un programme qui investit dans la création de projets Web3. 

‍

Après des expériences au Wagon, puis chez The Family, Jeddi s’est tourné vers la finance personnelle. Il a alors exploré le monde des crypto-monnaies, pour finalement se lancer dans le Web3. Avec Crypto Fellowship, il octroie des bourses de 100,000 euros aux créateurs de startups jouant ce nouveau terrain de jeu numérique. 

‍

Dans cet épisode du podcast Community Centric, nous échangeons avec lui sur le sujet de la communauté Web3. En particulier, sur l’enjeu de l’engagement, qui est sans commune mesure avec tout ce que l’on connaissait auparavant. Le Web3 a en effet permis un réel changement de paradigme : il insiste sur l’ownership et l’indépendance des communautés, comme de leurs membres. Initialement concentré sur le secteur financier, il attire aujourd’hui les acteurs d’horizons beaucoup plus divers. 

‍

Nous avons donc demandé à Jeddi quelles étaient les clés pour réussir, et comment fédérer sa communauté Web3 !

‍

Les défis de la rétention et de la confiance dans les communautés Web3

‍

Ce qui rend le Web3 assez paradoxal, et donc fascinant, c’est la contradiction entre ses principes fondamentaux. Au cœur de ce nouveau paradigme, on trouve en effet la recherche d’indépendance (notamment en rejet de l’hégémonie et du contrôle des plateformes & réseaux sociaux comme Facebook ou Amazon), mais aussi la notion très forte de communauté. 

‍

On peut donc se demander, avant de se lancer dans le Web3, comment aligner une philosophie intrinsèquement décentralisée avec l’objectif de fédérer des centaines, voire des milliers de membres au sein d’une même communauté ! 🤔

‍

Mais malgré cette apparente contradiction, les communautés Web3 sont créées affichent une croissance et un taux d'engagement insolents. Pour Jeddi, cela s’explique par leur ingrédient secret (et à double tranchant) : la spéculation. Les communautés du Web3 jouent en effet fortement sur le sentiment de FOMO. Les premiers arrivés sont les premiers gagnants, ce qui permet d’acquérir très rapidement et de manière organique de nouveaux membres. 

‍

Si l’entrée de l’entonnoir d’une communauté Web3 est donc particulièrement glissante, la question de la rétention se pose. La spéculation joue bien le rôle d'appât, mais moins celui de ciment communautaire. Pour maintenir le cap et créer des communautés pérennes, ses community builders et animateurs doivent donc se concentrer sur l’éducation de leurs membres, et la création d’un lien de confiance. 

‍

D’où l’importance d’impliquer la core team de tout projet dans l’animation d’une communauté Web3. Au-delà des rôles de modérateurs et de créateurs de contenu, l’équipe fondatrice à l’origine du projet doit rester très présente pour répondre aux questions et rassurer la communauté (voire gérer les crises en tout genres, fréquentes notamment dans l’univers de crypto). La notion de confiance, mais aussi d’incarnation du projet (ou doxing, dans le lexique du Web3) sont ainsi des valeurs très fortes de ces nouveaux projets.

‍

Le choix des bons outils pour une communauté Web3

‍

Une autre composante commune de nombreuses communautés sur le Web3, c’est leur présence sur Discord. Si Jeddi nous mentionne Colony comme une alternative de plus en plus populaire, Discord reste le canal de prédilection. 

‍

Un attachement qui peut s’expliquer par la continuité entre les communautés du gaming (qui ont été les premières à l’utiliser) et celles de la crypto, qui ont ouvert la voie du Web3. Rappelons que le choix d’un outil communautaire doit toujours être dicté par les usages de ses membres initiaux. 

‍

Mais l’outil Discord s’est surtout imposé grâce à ses nombreuses features, particulièrement adaptées à la communauté Web3. Elles facilitent notamment les échanges entre membres qui ne se connaissent pas et les chats avec plusieurs centaines de participants.

‍

Sur Discord, les communautés Web3 vont par exemple utiliser les salons vocaux et les spaces pour faciliter les échanges entre membres ou avec la core team. Twitter peut être investi de façon complémentaire, même si le réseau social est plutôt réservé pour communiquer en dehors de la communauté et faire connaître les projets.

‍

Portrait robot du Community Builder spécialisé Web3

‍

En plus d’avoir une bonne connaissance de Discord, quelles sont les autres qualités du Community builder dans le Web3 ?

‍

Pour Jeddi, il doit avant tout être extrêmement empathique, abordable et engageant. Le manager d’une communauté Web3 doit en effet s’assurer que chaque nouveau membre ait la sensation d’intégrer une famille. À lui de le guider vers son “Aha moment” (celui où il définit la valeur que la communauté pourra lui apporter), et de l’aider à s’y retrouver parmi les ressources et channels disponibles. 

‍

En plus d’un bon sens de l’humour et d’une répartie à toute épreuve, le Community Builder d’une communauté Web3 doit aussi : 

‍

• Très bien connaître son produit ;
• Etre structuré (pour s’y retrouver dans les méandres de Discord, et optimiser les ressources et canaux existants) ; 
• Comprendre les membres de la communauté, et l’usage qu’ils font de l’espace communautaire. 

‍

Un parfait exemple à suivre est celui du CB de Game of Blocks, un Play to Earn développé par Screenshot. Ce dernier a fait ses armes dans le milieu du jeu vidéo (comme beaucoup d’autres community managers, qui géraient autrefois des guildes). Pour animer sa communauté, il organise régulièrement des sessions live sur Twitch, invite ses top membres à répondre à des Q&A ou interviewe les membres de la core team pour les présenter au reste de la communauté. 

‍

Un vrai couteau suisse dont les bonnes pratiques devraient inspirer les futurs Community Builders dans le Web3. 

‍

Les cas d’usage inspirants pour construire sa communauté dans le Web3

‍

Parmi les meilleurs cas d’usage desquels s’inspirer pour lancer sa communauté Web3, Jeddi nous conseille donc de prendre exemple sur Game of Blocks. Et notamment de prendre son réflexe d'accueillir chaque nouveau membre avec un message privé. Un bon moyen de leur demander quels sont les sujets qu’ils souhaitent explorer et donc les guider vers les bonnes ressources. 

‍

Autre exemple inspirant : celui de Proof, la communauté de collectionneurs d’art créée par Kevin Rose. C’est selon Jeddi l’une des plus qualitatives et sélectives du Web3, notamment grâce au travail incroyable de son COO, Ryan Carson. 

‍

Mais s’il y a bien un aspect des communautés Web3 dont vous devez vous inspirer, c’est l’usage qu’elles font des DAO (Decentralized Autonomous Organizations) pour booster leur engagement communautaire. Dans le Web3, les membres peuvent en effet vous aider à définir votre roadmap, ou même vous accompagner dans le lancement de nouveaux projets. Comment ? En votant certaines, voire toutes les décisions de votre projet, à condition de détenir des jetons de gouvernances. 

‍

Certaines communautés, comme la plateforme d’échange décentralisée Sushi poussent le principe plus loin que d’autres. Cette dernière à en effet demandé l’aval de ses membres avant d’accepter la proposition d’un investisseur. Si les DAO sont de puissants leviers d’engagement, ils supposent de définir une culture interne ultra claire et lisible. Mais aussi pour les Community Builders de se transformer en véritables politiciens, capables de guider (de manière plus ou moins affirmée) les membres dans leurs décisions. 

‍

Le mot de la fin : deux conseils pour se lancer

‍

Pour clôturer nos échanges, Jeddi nous partage ses conseils pour se lancer dans le monde des communautés du Web3. Il nous invite ainsi à :

‍

• Regarder les top projets, trouver ceux qui nous intriguent le plus, et rejoindre leur Discord en tant que membre. Une bonne stratégie d’infiltration pour en comprendre les dynamiques et y glaner des bonnes pratiques ;

Suivre les profils et consulter le contenu produit par des Community Builders aguerris. À commencer par @pet3rpan, cofondateur de Meta Cartel (le premier DAO) et qui s’est depuis spécialisé dans l’aide à la croissance communautaire dans le Web3. Mais aussi de Louis (@albiverse), qui a aidé de nombreuses communautés à grandir. Ou encore le CB d’Olympus, l’une des communautés Web3 à avoir connu la croissance la plus fulgurante. Ce dernier a en effet documenté son aventure sur Twitter et y partage de précieuses ressources et conseils.

‍